Cordonnerie Poujol : une histoire de famille, de passion et de transmission

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  • Philippe Blanc travaille aujourd’hui avec sa fille Charlotte.
    Philippe Blanc travaille aujourd’hui avec sa fille Charlotte. PC
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Pauline Chaliez

Philippe Blanc a repris la cordonnerie Poujol, il y a 28 ans. Il travaille désormais avec sa fille Charlotte.

Philippe Blanc a repris la cordonnerie Poujol, du nom du père de son épouse, il y a 28 ans. Formé à la mécanique quand il était jeune, l’homme affirme avoir été à l’époque "plus comique que scolaire".

Après le dépôt de bilan de l’entreprise de son père, victime de la concurrence de l’époque et de la délocalisation – dont il avait pris la gérance encore jeune –, ses beaux-parents lui proposent de venir travailler avec eux à la cordonnerie Poujol, située rue Peyrollerie à Millau. Il accepte et les rejoint en 1993.

"Tous les jours, j’apprends des choses"

"Les premiers temps n’ont pas été faciles, j’avais l’habitude de beaucoup bouger et je me retrouvais enfermé à l’atelier et la boutique, dans une cave, du matin au soir. Les premières semaines, je me suis posé des questions", confie Philippe Blanc.

Ayant une bonne relation avec son beau-père, il apprend le métier durant 3 ans et prend la suite de l’entreprise en 1996, à la retraite de celui-ci. "Au départ, on ne faisait que de la réparation de chaussures. Quand on saisit la chaussure, on sait comment la personne marche. Mon beau-père m’a appris plein de choses que la plupart des cordonniers ne savent pas. J’ai tout cousu à la main, je me suis usé les doigts. Il faut beaucoup d’habileté dans ce métier. Aujourd’hui, on a des machines mais on se challenge au quotidien. Tous les jours j’apprends des choses, c’est devenu ma passion", raconte le cordonnier.

Transmission

"Tous les gens qui viennent au comptoir sont contents, c’est très valorisant de redonner vie à un sac, une chaussure. C’est un métier pas reluisant et pourtant il est très satisfaisant". Peu à peu, Philippe Blanc a envie de créer. Au lieu de ne faire que raccourcir et trouer des ceintures achetées ailleurs par ses clients, il décide de fabriquer sa toute première ceinture, rachetée depuis à sa cliente de l’époque, comme souvenir. Aujourd’hui, les ceintures personnalisées et sur-mesure représentent 50 % de son travail.

Le client choisit le cuir parmi 55 couleurs, sa boucle parmi 1 000, la couture, etc. et repart avec 30 minutes après. Le cordonnier utilise du cuir haut de gamme. Depuis quelques mois, sa fille Charlotte a rejoint l’entreprise suite à une reconversion professionnelle : "J’ai passé beaucoup de temps petite à l’atelier avec mon frère, je ne pouvais pas laisser partir ce patrimoine familial", confie la jeune femme, jusqu’alors infirmière. Avec son CAP maroquinerie, elle fabrique, des sacs notamment.

Philippe Blanc explique : "On a la chance d’avoir la partie ceintures qui est rentable, cela nous permet de laisser glisser la rentabilité sur d’autres produits et de pouvoir se faire plaisir en se challengeant". Lui qui apprend beaucoup en regardant des vidéos, a aussi gagné en efficacité et en technique sur les machines grâce à sa formation de mécanicien. Les réparations et la restauration de sacs, chaussures, portefeuilles, etc. font aussi partie des activités de l’entreprise.

"On se régale à travailler en famille"

À 62 ans, Philippe Blanc est ravi que sa fille reprenne l’entreprise : "C’est un métier très technique pour lequel il faut un gros bagage. Si ça n’avait pas été ma fille, j’aurai mis la clé sous la porte. C’est impossible pour un jeune de s’en sortir sur une activité professionnelle comme celle-là avec seulement une formation".

Charlotte ajoute : "J’ai dû me battre pour obtenir ce contrat pro. Le métier de cordonnier est mal considéré et c’est encore plus compliqué quand on est une femme". Elle a mis 1 an avant d’en parler à ses parents et son père a souhaité qu’elle fasse un essai de 15 jours avant de confirmer.

"On se régale à travailler en famille, je lui laisse la place, elle décide déjà de beaucoup de choses. On n’a pas peur de se dire quand ça ne va pas. Je veux qu’elle réussisse, je lui transmets autant que possible", explique-t-il. Tous deux ont à cœur de faire savoir à quel point leur métier est dans l’air du temps et de valoriser un savoir-faire trop méconnu.

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